Chapitre IV : Les lasers

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table des matières de la page :

I- Introduction.. 2

1. Principe général 5

2.Explications physiques. 26

a) Les milieux actifs. 29

b) Les cavités. 43

3. Caractéristiques des lasers : 62

4. Les types de lasers : 70

a) Les lasers solides. 75

b) Les lasers à liquide. 81

c) Les lasers à gaz. 86

5. Les interfaces. 95

a) Le bras articulé à miroirs. 97

b) Les fibres optiques. 100

c) Les endoscopes. 104

d) Les microscopes opératoires : 107

e) La lampe à fente : 111

II- Les lasers et le milieu médical : 115

1. Les effets biologiques du laser : 116

a) La fréquence : 122

b) L’intensité : 128

c) Le mode temporel : 131

2. Action du laser sur un milieu : 135

a) L'absorption : 138

b) La pénétration : 144

3. Exemples d’utilisation des lasers : 152

a) Ophtalmologie : 153

b) Dermatologie : 170

c) Chirurgie générale : 176

d) Neurochirurgie : 193

e) Oto‑rhino‑laryngologie : 221

f) Broncho‑pneumologie : 238

g) Gastro‑entérologie : 254

h) Urologie : 269

i) Gynécologie : 277

j) Cardio‑angéiologie : 290

k) Rhumatologie : 297

III Conclusion : 318

 

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I- Introduction

Le terme laser provient des initiales des mots anglais “ Light Amplification by Stimulated Emission of Radiations » qui signifie en Français “ Amplification lumineuse par émission stimulée de rayonnement ». Le 1er laser a été mis au point aux Etats Unis en 1960 par Théodore H. Maiman. Il s’agissait d’un laser à rubis mais dès l’année suivante était construit le laser à gaz. De nos jours, le laser s’est développé considérablement et ses applications sont nombreuses aussi bien du coté militaire que du coté médical. C’est ce dernier point dont on va développer le sujet.

 

1. Principe général

Les électrons qui gravitent autour d’un atome ne peuvent décrire que des orbites de rayon déterminé, correspondant à des niveaux d’énergie d’autant plus élevés que ce rayon est plus grand. Lorsque, sous une action quelconque (par exemple une élévation de température), un de ces électrons passe sur une orbite plus éloignée du noyau, l’atome est alors dans un état excité ; l’opération est appelée pompage, par analogie avec le travail d’une pompe. L’atome peut revenir de lui-même à l’état neutre ; il émet alors, sous forme d’un photon, un rayonnement dont la fréquence f est proportionnelle à l’énergie mise en jeu.

Mais l’atome excité revient plus facilement à l’état neutre sous l’action d’un photon de même fréquence f, ce qui fait deux photons, capables à leur tour de désexciter deux autres atomes ; il en résulte une émission en chaîne d’un très grand nombre de photons sous l’action d’un seul, dans un milieu actif, c’est-à-dire contenant un nombre convenable d’atomes excités, tel est le principe du laser.

Le laser ainsi produit est en fait une onde électromagnétique qui a la principale caractéristique de pouvoir se propager dans le vide et de se déplacer en ligne droite dans les milieux homogènes. Ce type d’ondes couvre un large spectre auquel correspondent des longueurs d’ondes s’étalant de quelques kilomètres à quelques centièmes d’Angstrom. Elles sont caractérisées par deux paramètres essentiels :

- La puissance de l’émission, mesurée en watts, qui est un paramètre quantitatif.

- La fréquence (inverse de la longueur d’onde), mesurée en hertz, qui est un facteur qualitatif : chaque fréquence correspond à une couleur particulière.

 

Fréquences et longueurs d’ondes des rayonnements électromagnétiques

Type d’onde

Fréquence

Longueur d’onde

Rayons gamma

>3.1020 Hz

< 0,001 nm

Rayons X

3.1019 Hz à 6.1017 Hz

0,01 à 5 nm

Ultraviolets

3.1016 Hz à 8.1014 Hz

10 à 400 nm

Lumière visible

3.1014 Hz à 4.1014 Hz

400 à 800 nm

Infrarouges

4.1014 Hz à 3.1012 Hz

800 à 15000 nm

Radio-électriques

Moins de 3.109 Hz

Plus de 1 mm

Hyperfréquence

3.1011 Hz à 3.109 Hz

1 mm à 10 cm

Ondes courtes

3.107 Hz

10 m

Ondes moyennes

3.106 Hz

100 m

Grandes ondes

3.105 Hz

1 km

 

 

2.Explications physiques

Tous les lasers sont composés d’un milieu actif excité par une source d’énergie, situé dans une cavité résonnante. Pour des raisons d’adaptabilités, on utilise des interfaces pour le transport du faisceau sauf pour de très rares cas.

a) Les milieux actifs

Le milieu actif peut être sous différents états tels que :

-L’état solide (rubis, émeraude).

-L’état liquide (gaz carbonique).

-L’état gazeux (hélium-néon).

-L’état semi-gazeux (colorant).

Les molécules d’un milieu sont, dans les conditions normales, à l’état fondamental. Pour devenir émetteur, ce milieu doit être excité par un moyen approprié : l’énergie ainsi acquise par les atomes est rapidement relarguée, soit par énergie calorifique ou en énergie cinétique, soit, si l’excitation est suffisante, par émission de photons dont la fréquence (la couleur) est fixée par la valeur des transitions électroniques caractéristiques de l’atome excité : plus cette valeur est grande, plus la fréquence émise est élevée.

L’émission spontanée des sources lumineuses naturelles est incohérente, chaque atome se désactivant indépendamment au bout d’un temps variable : les photons partent dans n’importe quelle direction. Par contre, si un photon rencontre un atome excité dont l’énergie de désactivation est égale à la sienne qui lui est propre, il provoque l’émission par cet atome d’un photon induit : c’est l’émission stimulée.

Pour que ce phénomène d’activation réciproque ait des chances de se produire, il est nécessaire qu’un nombre considérable d’atomes soient excités. La durée de vie des atomes ou molécules à l’état excité est normalement d’environ 1 millionième de seconde pour les transitions électroniques "permises". Mais ce temps peut être multiplié par un facteur de 1000 à 1 million pour un autre type de transition, infiniment moins probable, dite "interdite" : c’est à ce niveau "d’état métastable" (presque stable) que, sous l’action d’un apport énergétique intense et adéquat, des atomes d’un même degré d’excitation peuvent s’accumuler. Cette inversion de population qui existe naturellement dans les étoiles à des températures extrêmes, peut être réalisée grâce à un pompage approprié, technique mise au point en 1950 par le Français Albert Kestler, prix Nobel.

Toutefois, l’émission électromagnétique dont tous les photons ont la même fréquence (monochromatique) se fait de façon désordonnée car les photons sont émis dans n’importe quelle direction et à n’importe quel moment. Par contre :

 

b) Les cavités

§         Les cavités à miroirs plans :

L’obtention d’une inversion de population importante est toujours difficile, et l’amplification subie par l’onde lumineuse par unité de longueur est faible. Cela conduit à construire des cavités longues, en séparant beaucoup les miroirs. Or, le pompage exige généralement que l’une au moins des dimensions du milieu amplificateur soit faible. Ce double impératif conduit à des cavités à la fois longues et étroites, mettant en œuvre des miroirs largement séparés et de faibles dimensions. Mais alors, un phénomène bien connu en optique survient : la diffraction. Elle provoque à chaque réflexion de l’onde sur les miroirs, son élargissement et toute l’onde ainsi renvoyée n’atteint donc pas l’autre miroir, ce qui se traduit par des pertes importantes.

Il est donc très difficile de faire fonctionner un laser avec des miroirs plans, et la quasi-totalité des lasers utilisent au moins un miroir sphérique concave qui, à chaque passage de l’onde, la “ reconcentre » et réduit ainsi très fortement les pertes par diffraction.

§         Les cavités à miroirs sphériques

On montre que les cavités à miroirs sphériques favorisent, tout comme les cavités à miroirs plans, certaines ondes, qui en sont les modes.

Mais ces modes ne sont plus les ondes planes se propageant en faisceaux parallèles, caractéristiques des miroirs plans. Ce sont des faisceaux dits “ gaussiens », caractérisés par le fait que, à l’intérieur de leurs sections, l’amplitude du champ lumineux E obéit à une loi qui est une loi de Gauss  : , r étant la distance à l’axe où le champ passe par sa valeur maximale E0 ; et w est la mesure du rayon de la section transversale.

On note que, de part et d’autre d’une section de diamètre minimal 2 w0, appelée le “ col » ou la “ taille » du faisceau, celui-ci se dilate selon la loi : , z étant la distance à la taille.

§         Modes des cavités à miroirs sphériques et faisceaux gaussiens

C’est l’existence de surfaces d’onde sphérique qui fait que les faisceaux gaussiens sont des modes des cavités à miroirs sphériques. En effet, si l’on imagine, dans un faisceau gaussien, deux surfaces d’ondes quelconques remplacées par des surfaces réflectrices, il est aisé de voir que, chacune renvoyant l’onde exactement sur elle-même, celle-ci va osciller indéfiniment entre ces miroirs, en se retrouvant – à une atténuation près – identique à elle-même après chaque aller et retour : la définition d’un mode.

À l’inverse, si l’on se donne deux miroirs de courbure R1 et R2, séparés d’une longueur d, tout faisceau gaussien possédant, avec ce même écart, deux surfaces d’onde ayant ces courbures R1 et R2 sera un mode de la cavité formée par ces miroirs. On montre que l’on peut toujours trouver un tel faisceau à condition que R1, R2 et d  respectent la double condition : , ce qui signifie que ces miroirs peuvent alors constituer la cavité d’un laser. L’intérêt des cavités sphériques est leur commodité de réglage et elles sont très utilisées.

Cependant, si le gain de l’amplificateur est élevé, on peut s’affranchir de la condition ci-dessus, en constituant ce que l’on appelle une “ cavité instable ». Dans celles où l’élimination des modes transverses est facile, le même résultat peut être obtenu en conférant à l’un des miroirs un coefficient de réflexion décroissant du centre au bord, selon une loi, par exemple, gaussienne.

 

 

3. Caractéristiques des lasers :

Les nombreux va-et-vient effectués par les photons dans la cavité résonnante engendrent une directivité presque parfaite à la lumière c’est-à-dire que le faisceau émis est très étroit et les rayons sont pratiquement parallèles. Ces spécificités ne sont cependant pas les seules caractérisant les lasers, en effet la puissance de l’émission varie beaucoup selon la nature du milieu actif et la construction du laser. Et cette émission peut se faire de différentes manières :

  1. Continue : lorsque le pompage est constant (puissance constante).
  2. Impulsionnelle : le pompage est intermittent (l’énergie, relâchée en un temps très bref (» 100 ms), est beaucoup plus élevée que pour une émission continue).
  3. Déclenchée : un mécanisme appelé “ Q-SWITCH » empêche l’énergie de s’échapper (énergie relâchée en un temps encore plus bref que la précédente (» 10 ns) et la puissance crête est d’autant plus élevée).
  4. Bloquée : rayonnement émis en train d’impulsions dont la durée est de quelque dizaines de picosecondes et dont la puissance crête peut dépasser 10 gigawatts.

 

 

4. Les types de lasers :

Depuis le découverte du 1er laser, plusieurs centaines de types de lasers ont été réalisés fonctionnant à des longueurs d’ondes couvrant de l’infrarouge à l’ultraviolet. Ils utilisent des milieux actifs très variés, souvent réalisés par le mélange d’un composant principal neutre et d’une impureté activatrice : c’est le dopage. Ils reposent sur le même principe de base mais diffèrent par leur puissance, leur fréquence, la propriété de leur faisceau... On peut les classer en 3 catégories :

  1. Les lasers solides constitués d’un cristal ou d’un verre dopé.
  2. Les lasers à liquide.
  3. Les lasers à gaz.

a) Les lasers solides :


Le laser à rubis : Il émet dans le rouge foncé (lointain) à 692,7 et surtout à 694,3 nm et est le laser le moins utilisé actuellement. Le pompage est réalisé par une ou deux lampes flashes au xéon avec une enveloppe en quartz pour laisser passer les ultraviolets qui sont absorbés par le cristal tout comme les rayons lumineux. Il fonctionne sur le mode impulsionnel et peut atteindre une puissance de 100 Watts.

Le laser Néodyme-Yag : Il émet dans l’infrarouge proche à 1064 et 1318 nm. C’est le plus répandu des lasers solides. Le pompage se fait  soit par une ou plusieurs lampes à arc, soit par des flashes à gaz rares, soit par d’autres lasers, semi-conducteurs en particulier, le tout enserré dans une cavité réflectrice de façon à concentrer le maximum d’énergie sur le barreau. Il fonctionne soit sur le mode impulsionnel avec des durées d’impulsions d’environ 50ms, soit sur le mode déclenché ou bloqué qui permet d’atteindre durant des temps très brefs des énergies énormes.

Le laser à Alexandrite : Il émet dans le rouge entre 700 et 800 nm. Son émission stimulée est couplée à une vibration du réseau cristallin qui a pour effet d’élargir la bande d’émission. Ce laser est beaucoup moins utilisé que le YAG et sa puissance est plus limitée (3 Watts en continu mais près de 20 mégawatts-crête en impulsionnelle).

Le laser à semi-conducteurs : Il émet selon sa composition dans l’infrarouge proche et le rouge. Il utilise en pompage le courant électrique et son rendement excellent permet de l’exciter par de simples piles. Cependant sa puissance est limitée à quelques dizaines voire quelques centaines de watts. Il a un grand avenir dans les télécommunications par fibres optiques.

 

b) Les lasers à liquide :

Du fait que de nombreux composés organiques absorbent efficacement certains rayonnements et présentent à l’état liquide une fluorescence intense qui couvre généralement une large bande située dans le visible, on peut sélectionner à l’aide d’un prisme une longueur d’onde particulière.

Le milieu actif est composé de divers colorants dont chacun à une bande de fréquence qui lui est propre.


Le pompage peut être réalisé par flash. Dans ce cas le liquide est placé dans un tube, le colorant est projeté sous forme d’un jet extrêmement fin sur lequel le faisceau d’un laser émet à une fréquence efficacement absorbée par le milieu actif et est braqué selon l’angle le plus favorable (où la réflexion est minimale) ou angle de Brewster.

 

 


c) Les lasers à gaz :

Ils sont tous constitués d’un tube contenant le gaz excitable dont les extrémités sont soit transparentes, soit réfléchissantes.


Laser à Hélium-Néon : Ce fût le 1er laser émettant en continu. Il émet dans le rouge à 632,8 nm, son émission est très pure et sa puissance ne dépasse pas les 50 mW. Le pompage est électrique, l’excitation porte sur le néon et le refroidissement se fait par air.

Laser à argon et krypton ionisés :  Ces gaz perdent facilement un électron sous l’action d’une décharge électrique et les atomes ainsi ionisés constituent le milieu actif. L’argon ionisé a une émission continue ou en train d’ondes très brèves (sa puissance peut atteindre 20 W avec des raies sélectionnables, dans le bleu à 488 nm et dans le vert à 514,5 nm). Le krypton, quant à lui, émet dans le rouge et le jaune et sa raie la plus intense peut atteindre 647,1 nm. Le refroidissement se fait par l’eau.

Laser à vapeur métallique : A de très hautes températures, on peut obtenir des vapeurs d’un certain nombre de métaux qui peuvent permettre la réalisation d’un laser. Il peut émettre dans le bleu (or), dans le vert (cuivre, manganèse) ou  dans le rouge (or, plomb). Ce laser est impulsionnel avec des taux de répétition très élevés et sa puissance dépend du diamètre du tube.

Laser à gaz carbonique : Il émet dans l’infrarouge lointain, principalement à 10,6 nm. Sa puissance peut atteindre en continu 300 W et plusieurs kilowatts en impulsions. Son alimentation se fait par décharges électriques, son refroidissement se fait par eau ou huile.

Laser à azote : C’est le 1er laser dont une émission dans l’ultraviolet a été observée. Il émet par impulsions brèves (1 à 10ns) ce qui fait que sa puissance est très limitée.

Laser à excimères : C’est un laser dont le milieu actif est constitué de molécules diatomiques n’existant qu’à l’état excité résultant d’une réaction que l’on peut  provoquer par des décharges électriques sous haute pression entre gaz rares (argon, krypton, xénon), ainsi qu’entre gaz rares et halogènes (fluor, chlore, brome, iode) ou oxygène et gaz rares (oxyde de xénon). Parmi la vingtaine de molécules, le fluorure de krypton et le chlorure de xénon possèdent des performances similaires, ils émettent dans l’ultraviolet et respectivement  à 248 et 308 nm. Ils fournissent des impulsions d’une durée de 10 à 20 ns dont la puissance crête est de plusieurs mégawatts, mais cela représente une puissance moyenne de 25 W du fait de leur cadence de répétition élevée.

 

 

5. Les interfaces :

Afin de focaliser le laser sur un point minime ou, au contraire, de le disperser, on utilise des interfaces dont les caractéristiques varient en fonction de leur conception.

a) Le bras articulé à miroirs :

Il est essentiellement utilisé pour les lasers CO2 et fonctionne sur le principe de la réflexion sur des miroirs (généralement au nombre de 7) disposés dans les coudes d’un bras articulé. Ce système exige une mécanique précise, ce qui le rend assez fragile et surtout onéreux. Cependant il a l’avantage de conserver au faisceau toutes ses qualités optiques. Au bout du bras se trouve une sorte de stylo optique comportant diverses lentilles de focalisation interchangeables en matériau transparent au rayonnement émis ce qui permet au chirurgien une bonne prise en main.

 

b) Les fibres optiques :

Elles constituent un moyen de transmission quasiment idéal pour la majorité des lasers sauf les lasers à CO2 car les fibres actuelles ne sont pas suffisamment transparentes aux infrarouges lointains. Il en existe plusieurs types mais seule la “ monofibre multimodale à saut d’indice », dont le coeur en silice est entouré d’une gaine en silicone ou en silice dopée dont l’indice de réfraction est plus faible, est utilisée en milieu médical. Cette conception permet ainsi au rayon lumineux de passer lorsqu’on courbe la fibre car lorsqu’un rayon lumineux est incliné sur l’axe, il est renvoyé au coeur de la fibre par réflexions successives coeur/gaine. Toutefois, elle n’est pas exempte de défaut car le faisceau qui en émerge est légèrement divergent et a perdu une partie de sa cohérence initiale.

Le coeur de la fibre est selon l’application de 200, 400 ou 600 µm et celui de la gaine n’excède pas 1 mm ce qui permet une grande flexibilité. Les fibres optiques peuvent être utilisées nues mais, en raison de leur fragilité, elles sont le plus souvent protégées par une gaine en téflon et éventuellement refroidies du fait du possible échauffement du coeur avec la puissance du rayonnement. En général, on adapte en bout de fibre une pièce à main dont le type diffère selon les usages.

 

c) Les endoscopes :

Ce sont des tuyaux de différents diamètres comportant un système d’éclairage, un système d’observation et un canal opérateur. Ils peuvent être rigides ou souples avec une extrémité orientable au moyen de câbles actionnés depuis la poignée de commande. L’éclairage et l’observation se font alors par des fibres optiques très fines. Certains modèles comportent des système d’insufflation de gaz et d’aspiration ou d’injection de liquide et ils peuvent être couplés à une caméra pour projection du champ opératoire sur écran de télévision. L’adaptation des lasers ne pose pas de problème car on utilise le canal opérateur pour faire la visée ou pour introduire la fibre optique préalablement stérilisée.

 

d) Les microscopes opératoires :

Ce sont des microscopes binoculaires stéréoscopiques à grossissement réglable qui, couplés à un micromanipulateur, permettent des dissections fines irréalisables directement. Montés sur différents systèmes endoscopiques pour une chirurgie non invasive, ils permettent l’examen direct et l’intervention au niveau des structures telles que le cerveau, l’abdomen, les articulations et de cavités comme le larynx et les bronches, le tubes digestif, le système uro-génital ou vasculaire.

Un boîtier permet d’adapter le bras articulé ou la fibre du laser sur le microscope, et un système optique assure la focalisation du faisceau et la visée dans le champ de vision du microscope.

 

e) La lampe à fente :

Elle est surtout utilisée en ophtalmologie, analogue au microscope opératoire mais comportant  un système d’éclairage particuliers qui projette, selon différents angles, une raie lumineuse de couleur et de largeur réglable à l’intérieur du globe oculaire du patient, non seulement pour en faire un examen complet, mais également pour en évaluer la courbure.

Le faisceau du laser, généralement à argon, est transmis le plus souvent par une fibre optique et orienté à l’aide d’un miroir et d’une manette permettant de diriger à distance le faisceau lumineux du laser appelée palonnier. Un zoom permet de régler le diamètre de l’impact (entre 50µm et 1 mm).

 

 

 

II- Les lasers et le milieu médical

1. Les effets biologiques du laser :

Les effets biologiques du laser dépendent de plusieurs paramètres :

- La fréquence de l‘émission.

- L’intensité de l’émission.

- Le mode temporel (continu ou discontinu) de l’émission.

a) La fréquence :

Elle détermine le niveau de l’intéraction entre le rayonnement et la matière qui ne dépend que de la quantité d’énergie véhiculée par chaque photon, c’est-à-dire que plus cette quantité est grande plus la fréquence est élevée. Les effets biologiques sont propres à une fréquence donnée. En effet, les rayonnements :

 

b) L’intensité :

Elle conditionne la quantité d’énergie absorbée par unité de surface et de temps. La profondeur de pénétration du rayonnement est fonction du pourcentage d’énergie dissipée par unité de longueur (facteur volume), pourcentage variable selon l’absorption du tissu irradié, spécifique de la fréquence de l’émission. Ces paramètres conditionnent l’effet calorifique recherché en photochirurgie, d’autant plus intense que le rayonnement est rapidement absorbé. Cette action dépend également du mode temporel de l’émission, ainsi que de la vascularisation du tissu considéré.

 

c) Le mode temporel :

Il influence également son effet biologique. Des expérimentations ont montré que les émissions pulsées ont des effets biochimiques plus marqués que les émissions continues, pour des intensités moyennes semblables ou inférieures. Les tissus réagissent à la fois, aux rayonnements d’une façon spécifique ou aspécifique, ainsi qu’aux variations propres du champ électromagnétique. Tous les systèmes semblent sollicités, y compris les acides nucléïques des noyaux cellulaires. Avec les lasers “ déclenchés » ou “ bloqués », on obtient des impulsions extrêmement brèves et des densités de flux considérables qui créent un plasma et une onde de choc extrêmement localisés, susceptibles de désintégrer les structures moléculaires du milieu récepteur même s’il est transparent au rayonnement : cela est particulièrement intéressant en ophtalmologie.

 

 

2. Action du laser sur un milieu :

Lorsqu’un rayonnement est dirigé, à partir d’un milieu initial (air ou fibre optique), sur un milieu dont l’indice de réfraction est différent (comme un tissu biologique), une partie du rayonnement est réfléchie à l’interface et l’autre pénètre dans le milieu. Deux phénomènes se produisent au niveau du rayonnement transmis : il y a réfraction des rayons qui abordent la surface de séparation en oblique et absorption d’une partie du rayonnement par les molécules du milieu, dont l’énergie est de ce fait augmentée.

Les tissus biologiques étant très inhomogènes, les phénomènes de réfraction sont particulièrement marqués, entraînant une diffusion importante et rendant rapide­ment le faisceau très divergent. Ces phénomènes sont communs à toutes les fréquences d'ondes électromagné­tiques.

a) L'absorption :

Elle est conditionnée par la fréquence : cha­que molécule a un “ spectre » d'absorption qui lui est propre. La transparence des tissus biologiques diminue progressivement des ondes hertziennes (ondes radio) aux infrarouges, alors qu'elle augmente à partir des ultravio­lets jusqu'aux rayons gamma. Cela est dû à la richesse en eau de ces tissus (70 % environ du poids du corps humain) : l'absorption des ondes électromagnétiques par l'eau croit rapidement de la gamme des ondes longues jusqu'aux infrarouges. Après un maximum dans l'infra­rouge lointain, on assiste à un effondrement dans l'infra­rouge proche et le visible, correspondant, dans notre environnement terrestre chargé d'humidité, à une “ fenê­tre atmosphérique » de propagation dans laquelle la transparence maximale se place autour de la couleur jaune‑vert (ce qui permet l'ensoleillement de notre globe). Immédiatement au‑delà, dans l'ultraviolet, le coefficient d'absorption culmine à un niveau très élevé avant de décroître pour les fréquences X et gamma.

Pour cette raison, le puissant rayonnement du laser CO2, qui émet dans l'infrarouge lointain, est fortement absorbé par l'eau : il volatilise les tissus et donne une coupe fine et rapide dont la profondeur, limitée à 2 millimètres, est avantageuse en chirurgie.

Le rayonnement vert du laser argon traverse facilement les milieux aqueux, mais est entièrement absorbé par l'hémoglobine du sang : il photocoagule parfaitement les hémorragies superficielles et est bien adapté à la destruc­tion des tumeurs vasculaires (angiomes).

Par contre, les lasers au rubis et au néodyme, dont les émissions intenses, respectivement rouges et infrarouges proches, sont bien absorbées par les tissus mais peu par l'eau et le sang, sont préférables pour maîtriser les hémorragies profondes. L'absorption par les pigments rétiniens de tous les rayonnements visibles, contrairement aux parties antérieures de l'œil (transparentes), repré­sente des conditions favorables à l'emploi des lasers à rubis, krypton et argon en Ophtalmologie.

 

b) La pénétration :

Elle est fonction de cet ensemble de facteurs:

En effet,  les os fins laissent passer une certaine quantité de rayonnement alors que les structures translucides, tels le tissu cartilagineux (pavil­lon de l'oreille) ou les tendons, semblent moins transpa­rents que d'autres tissus plus opaques (muscles), sans doute parce que ces structures jouent le rôle de guide d'ondes et réfléchissent l'émission longitudinalement; que les tissus glandulaires (testicule) sont relativement perméables aux rayonnements laser et doivent être biolo­giquement influençables par ces émissions.

 

 

3. Exemples d’utilisation des lasers :

a) Ophtalmologie :

Il est logique que ce soit au niveau de l'œil, récepteur privilégié de la lumière, que les premières applications médicales des lasers aient été réalisées. L'utilisation des lasers à argon, et plus tard à krypton, au néodyme-YAG en impulsions ultracourtes (mode bloqué) et à excimères, a fait faire de grands progrès à l'ophtalmologie.

Applications thérapeutiques des lasers :

Les traitements par laser ne s'adaptent qu'à une partie des maladies de la sphère oculaire: ils n'ont actuellement aucune application intéressante au niveau de la paupière et de la conjonctive.

Les affections de la rétine ont été les premières à bénéficier des possibilités des émissions laser. Les décollements de la rétine, provoquant une déchirure de la membrane, se produisent le plus souvent chez les grands myopes et chez les sujets âgés dont l'état vasculaire est médiocre, ou à la suite d'un traumatisme.

Le traitement, préventif ou curatif, consiste à détruire ou à isoler la lésion en la cernant de trois ou quatre rangées d'impacts laser juxtaposés, la coagulation des tuniques assurant leur soudure.

Les lasers à argon, dont les émissions vertes et bleues sont bien absorbées par les milieux pigmentés et vasculaires du fond de l'œil, ont remplacé depuis deux décennies les premiers lasers à rubis. L'élévation thermique, importante mais très localisée au niveau de l'impact sur la rétine, est faible dans les milieux intra‑oculaires, assurant une cicatrisation beaucoup plus rapide qu'avec les anciens arcs au xénon. Enfin, la rapidité de l'opération et son caractère strictement indolore permettent d'intervenir sur des patients non anesthésiés, et sans hospitalisation.

Pour l'ablation chirurgicale du cristallin, qui est nécessaire pour maintenir la vision lorsque les moyens médicaux s'avèrent insuffisants, l’utilisation du laser néodyme-YAG en mode bloqué (impulsions hyper puissantes de quelques picosecondes) permet l'ouverture de la capsule antérieure du cristallin et ainsi faciliter l'extraction.


 


Prospectives :

Les études s'orientent dans trois sens:

1.      recherche de lasers de nouvelles longueurs d'onde.

2.      meilleure utilisation des lasers.

3.      scanners à lasers.

Les lasers à excimères, tirant dans l'ultraviolet, permettent de réduire considérablement les effets thermiques autour du point d'impact : les tissus sont littéralement volatilisés sur place ce qui laisse une plaie extrêmement fine, dont les bords sont parfaitement nets et réguliers (photoablation). On les utilise par exemple dans les incisions parfaitement concentriques de profondeur déterminée permettant de modifier la courbure de la cornée et de réduire la myopie.

La tomographie laser fournit des images digitalisées, c'est‑à‑dire point par point, du nerf optique, qui peuvent être reconstruites en trois dimensions a la manière d’un scanner classique. Des prototypes d'appareils de ce type ont été récemment réalisés aux États‑Unis. Ils sont au stade expérimental, mais s'avéreront certainement très utiles pour évaluer objectivement l'état des nerfs optiques chez les malades .

L'utilisation des lasers a transformé la chirurgie ophtalmologique : les découvertes futures permettront à coup sûr d'élargir encore le champ des possibilités thérapeutiques de ces appareils “ de lumière », peut-être grâce aux lasers à colorants dont la fréquence est “ accordable », peut-être par la représentation holographique (en trois dimensions) du champ opératoire et le calcul informatisé, pour le bénéfice et le confort des patients.

 

b) Dermatologie :

Depuis plusieurs année, un grand nombre d'applications qui représentent un réel progrès en thérapeutique dermatologique ont été codifiées. Et le laser à argon est le plus employé dans cette discipline.

Les angiomes, qui sont des tumeurs plus ou moins bien individualisées constituées par l'agglomération de vaisseaux sanguins ou lymphatiques (ils se développent fréquemment sur le visage et posent un problème esthétique), sont de nos jours traités par le laser à argon dont l'émission est sélectivement absorbée par l'hémoglobine du sang. Ce traitement laser est généralement réalisé par coagulation des lésions point par point, à la pièce à main. Les puissances utilisées sont de l'ordre de 2 watts par millimètre carré, en impacts de 0,2 seconde. Ainsi les tissus sains, épiderme et annexes, relativement transparents au rayonnement, sont peu concernés par les effets thermiques, ce qui assure, en règle générale, une bonne cicatrisation. Cependant, les traitements aux lasers à argon sont limités par l'épaisseur et la couleur des lésions car leur émission n'intéragissent avec les tissus qu'en fonction de son absorption.

Des tentatives de traitement avec d'autres types de lasers ont été faites. Le laser au rubis pulsé offre deux avantages : son émission, très brève, est pratiquement indolore. Le diamètre de ses spots, beaucoup plus important que celui de l'argon, permet des traitements de larges surfaces en un seul temps. Il peut être utilisé seul, ou conjointement au laser à l'argon dans le traitement des angiomes

Les lasers à colorants ont les mêmes avantages que les lasers a rubis, avec en plus la possibilité d'optimaliser la longueur d'onde de l'émission en fonction du spectre d'absorption maximum de la lésion (585 nm pour un angiome). En régime pulsé (impulsions de 300 à 500 microsecondes), leur spot lumineux, d'un diamètre de plusieurs millimètres, n'attaque pas l'épiderme : la cicatrice n'est donc jamais dystrophique. Ils ne sont toutefois efficaces que sur les vaisseaux dont la lumière est inférieure à 80 micromètres, ce qui rend plusieurs passages nécessaires sur la même zone pour obtenir un palissement notable. Mais leurs tirs sont à ce point indolores qu'ils sont facilement utilisables chez les jeunes enfants. Une technique de gestion du laser et de balayage automatique par pièce à main robotisée (Hexascan) a été mise au point par Jean‑Marc Bruneteaud et Serge Mordon : elle assure une plus grande rapidité de traitement et une meilleure uniformité cicatricielle, mais est encore peu répandue.

De nombreuses autres lésions cutanées à composante vasculaire ont pu ainsi être abordées avec succès.

Les verrues vulgaires, certaines tumeurs superficielles bénignes, les végétations vénériennes (crêtes de coq) qui siègent sur les organes génitaux externes, à la marge anale, dans le vagin ou sur le col utérin, classiquement détruites par électrocoagulation, sont plus facilement traitables par les lasers à argon, au CO2 ou néodyme‑YAG qui ont l'avantage de la rapidité d'action, de la meilleure qualité de cicatrisation, de l'absence d'hémorragie et du moindre pourcentage de récidive.

 

c) Chirurgie générale :

Les qualités de coupe et de coagulation des lasers ont rapidement intéressé les chirurgiens mais ces propriétés, en rapport avec l'effet thermique résultant de l'absorption de l'énergie lumineuse par les tissus, ne sont pas uniformément réparties parmi les lasers : même pour détruire, il faut faire la part du qualitatif autant que du quantitatif.

Au‑dessus de 44 degrés centigrades, les tissus se rétractent : entre 60 et 80 degrés ils sont coagulés et au‑delà, ils sont carbonisés, et vers 100 degrés, volatilisés. Selon la sélectivité de l'absorption par les divers composants des tissus, l'action prépondérante est soit la coupe, soit la coagulation en surface ou en profondeur.

L'émission infrarouge des puissants lasers au CO2 est fortement absorbée par l'eau, qui constitue environ 70 % du poids du corps humain : elle volatilise les tissus, ce qui donne une coupe nette et fine de 1 à 2 millimètres de profondeur, mais n'empêche pas l'hémorragie des tissus vascularisés. Son rayonnement étant invisible, il est nécessaire, pour que le chirurgien puisse ajuster son geste, de l'accompagner d'une émission lumineuse de même axe : c'est, en pratique, un laser hélium‑néon de faible puissance qui sert de viseur.

Par contre, les lasers à l'argon (vert et bleu), au krypton (jaune et rouge), au rubis (rouge foncé) et au néodyme (infrarouge proche, donc invisible), dont l'émission pénètre plus profondément dans les tissus, ont un effet thermique moins localisé : ils coagulent mieux, mais donnent une coupe moins précise que le laser au CO2.

L'argon, très absorbé par le sang, est le plus performant pour les hémorragies de surface. Il nécessite 4 à 5 fois moins de puissance que le néodyme‑YAG pour obtenir un même effet, mais il est impuissant sur des vaisseaux dont la lumière excède 0,5 millimètre. Par contre, le YAG, dont l'action prépondérante se situe au niveau des protéines, assure une hémostase (arrêt d'hémorragie) plus profonde et permet la coagulation de vaisseaux de 2 millimètres de diamètre.

Le choix est donc délicat et difficilement parfait. Seul le laser CO2, véritable scalpel optique, est apte à remplacer le classique bistouri dans certains gestes de chirurgie générale, alors que l'argon ou le néodyme‑YAG, selon les cas, peuvent avantageusement évincer l'électrocoagulateur (bistouri électrique). Mais ceci représente, dans le bloc opératoire, deux gros appareils bien embarrassants.

Le CO2, dont les émissions ne passent pas à travers les fibres optiques qui équipent les autres lasers, doit être couplé à un bras articulé, aussi loger et maniable que possible, et équipé d'une pièce à main à focales interchangeables. Le geste chirurgical, modifié par le manque de contact avec la plaie opératoire, devient très complexe pour un système multi‑lasers, le chirurgien n'ayant que deux mains, sans parler du coût de l'installation.

Les lasers ont toutefois des avantages décisifs : ils permettent d'effectuer des opérations de coupe, de destruction et d'hémostase, sans contact avec les tissus, ce qui limite les risques d'infection secondaire. De plus, leurs émissions sont aseptisantes par effet calorifique : les microbes éventuellement présents sont détruits en même temps que les tissus.

Les lasers à CO2, au Nd : YAG et à argon (souvent trop peu puissant) sont les seuls à être utilisés actuellement en chirurgie générale.

Par un paradoxe apparent, la chirurgie des grands brûlés a été une des premières à profiter des avantages du laser. En permettant, sans le moindre contact, l'excision précoce des tissus nécrosés avec stérilisation de la plaie sous‑jacente, le rayonnement CO2 active la cicatrisation des zones atteintes, réduit les pertes sanguines et les exsudations qui affaiblissent le patient. Donc des greffes de peau, qui ne prennent que sur une surface saine, peuvent alors être pratiquées dans des délais beaucoup plus brefs et dans de meilleures conditions.

L'utilisation simultanée d'un rayonnement CO2 et d'un rayonnement néodyme-YAG, focalisés sur un même point et pilotés par un faisceau coloré provenant d'un laser hélium‑néon ou argon de faible puissance, a transformé les données de la chirurgie au laser. Grâce à cette méthode on obtient une coupe rapide, parfaite, et une hémostase instantanée. Cela permet de pratiquer des résections partielles d'un organe aussi vascularisé que le foie avec un minimum d'effusion sanguine, et d'éviter ou tout au moins de limiter considérablement les transfusions importantes, avec les risques que cela implique, nécessitées par les techniques classiques.

Aujourd’hui les appareils sont des montages compacts, commercialisés, réunissant les deux lasers chirurgicaux et le laser de guidage sous un même habillage (Combo‑laser).

Il est probable que cette innovation, particulièrement précieuse lorsqu'il faut intervenir sur un tissu qui saigne abondamment ou qui risque de disséminer des cellules malignes ou parasitées, sera rapidement favorable à la multiplication des utilisations de ces appareils en grande chirurgie.

 

d) Neurochirurgie :

Les premières applications des lasers en neurochirurgie eurent lieu en 1976, avec le CO2, puis, en 1980, avec le néodyme‑YAG.

-  Nécessité d'éviter un sacrifice délibéré de tissu cérébral qui ne se reconstitue pas.

- Obligation de ne pas léser les zones spécialisées de la couche externe du cerveau (cortex) sous peine d'entraîner des dommages définitifs.

- Nécessité de préserver la circulation cérébrale durant l'opération, d'éviter  l'hémorragie post‑opératoire, susceptible de provoquer une compression redoutable dans la cavité non expansive qu'est la boîte crânienne.

Face à ces contraintes anatomiques et physiologiques, la neurochirurgie moderne a bénéficié d'importants progrès techniques, au premier rang desquels se placent, très certainement, les lasers : ils permettent de réaliser, grâce à leurs propriétés thermiques, tout à la fois la vaporisation, la section et la coagulation. De plus, leur rayonnement peut être facilement dirigé à travers le microscope opératoire branché sur un endoscope, quotidiennement utilisé en neurochirurgie.


Les lasers ont ainsi considérablement amélioré la sécurité des opérations sur le cerveau, l'absence de contact entre l'instrument et le tissu diminuant le risque de blessure de structures fonctionnellement importantes. Ils permettent de réaliser des interventions considérées jusqu'à présent comme périlleuses voire irréalisables, où s'accompagnant à coup sûr de dommages irréversibles.
Laser Néodyme YAG 30W 3mJ 1064 nm Utilisé pour le traitement des tumeurs au cerveau
 

Le parenchyme cérébral est un tissu mou, non pigmenté, riche en eau. Il est donc logique que les émissions des lasers à CO2, qui interagissent fortement avec l'eau, soient beaucoup plus rapidement absorbées (en moins de 1 millimètre) que celles des néodyme-YAG qui pénètrent à environ 8 millimètres. Les qualités et les inconvénients de chacun de ces lasers sont valorisés par ces caractéristiques.

- Section précise avec effet thermique spatialement réduit

- Possibilité de vaporisation des tumeurs solides

- Absence d’œdème post‑opératoire

- Raccourcissement du temps opératoire

- Manipulation non invasive grâce au microscope opératoire et précise par micromanipulation.

- Faible pouvoir hémostatique

- Augmentation de la durée de destruction des tumeurs volumineuses (de plus de 3 à 5 centimètres)

- Risque de blessure de parties nobles en cas de déplacement du spot par inadvertance en raison de la puissance du rayonnement.

- Remarquable effet d'hémostase sur les hémorragies en nappe

- Coagulation de vaisseaux jusqu'à 2 millimètres de diamètre

- Possibilité de résection de malformations vasculaires

- Utilisation très pratique grâce aux fibres optiques.

- Section parenchymateuse difficile

- Vaporisation peu efficace

- La puissance utilisable étant limitée par les effets thermiques en profondeur.

La chirurgie cérébrale est dominée par le traitement des tumeurs, des hémorragies et des troubles vasculaires.

Les propriétés des lasers à CO2 sont essentiellement exploitées pour l'exérèse des tumeurs solides, cancéreuses ou bénignes.

Le laser au néodyme-YAG est préféré pour la destruction de tumeurs profondes ou d'abord difficile (son rayonnement, vehiculable par fibre optique, est plus facilement dirigé dans des endroits peu accessibles), dures et saignantes, pour le traitement des hémorragies en nappe ou encore des sutures vasculaires.

L'intérêt des lasers à argon est limité, par sa puissance trop faible, à l'ablation des tumeurs cérébrales molles, des tumeurs de la moelle épinière, et à la section sélective des racines postérieures (sensitives) de certains nerfs rachidiens dans le traitement de douleurs irréductibles.

 

e) Oto‑rhino‑laryngologie :

Cette spécialité ne concerne que des cavités (oreilles, nez, gorge, larynx) dont l'examen nécessite des instruments spéciaux. Les anciens outils sont de nos jours remplacés, pour les actes opératoires, par des endoscopes rigides ou souples (fibroscopes), le plus souvent couplés à un microscope opératoire, à une caméra projetant l'image sur un écran de télévision, et à divers instruments de mesure.

Les émissions laser peuvent être véhiculées soit par miroirs orientables pour le laser à CO2, soit par fibres optiques pour les autres lasers, à travers des endoscopes adaptés à chaque organe. L'ORL a été une des premières spécialités à bénéficier de ces progrès ainsi que des traitements par laser.

Dans le domaine des cancers de la cavité buccale, les lasers habituels n'ont qu'une valeur palliative ou de confort, dans le but de réduire le volume de tumeurs buccales qui ont une fâcheuse tendance à disséminer. Le laser à colorant peut dans certains cas, couplé à certains composants chimiques, réaliser une cure spéci­fique.

Un traitement ambulatoire a été appliquer pour lutter contre le ronflement. En effet le ronfleur est un asphyxi­que qui s’ignore. Le ronflement s'accompagne d'arrêts respiratoires, plus ou moins fréquents et plus ou moins prolongés, ce qui entraîne une sous‑oxygé­nation, en particulier cérébrale et cardiaque, facteurs de fatigue et de somnolence. Le traitement est basé sur une résection progressive du voile du palais et de ses attaches en fond de gorge (piliers postérieurs) au laser à CO2 de faible puissance (10 à 20 watts), sous simple anesthésie par pulvérisation locale (spray), afin de réaliser un élargisse­ment progressif de l'isthme pharyngé. Cette méthode ne provoque jamais d'hémorragie si ce n’est que de légères «douleurs d'angines » vite calmées.

 C'est la pathologie laryngée qui a le plus bénéficié des indications du laser, tant dans les troubles de la voix que dans les états précancéreux ou cancéreux et les sténoses laryngo‑trachéales.

Il n'est malheureusement pas possible, de nos jours, d'employer le fibroscope souple pour les interventions sur le larynx, car les rayonnements laser transmissibles par fibre optique (néodyme‑YAG ou argon) sont trop pénétrants : ils léseraient les muscles des cordes vocales et altéreraient définitivement la voix. Seul le laser à CO2 émettant en continu, relié par bras optique à un laryngoscope rigide couplé à un biomicroscope, est utilisable.

Certaines affections ont vu leur traitement et leur pronostic totalement modifiés par l'emploi du laser. Comme pour la papillomatose laryngée chez les enfants, maladie bénigne mais très récidivante, caractérisée par la prolifération de petites tumeurs pédiculées. Le traitement repose sur la vaporisation des lésions au laser à CO2, ce qui permet une exérèse sans saignement et une récupération anatomique parfaite, au prix d'une simple hospitalisation de 48 heures. Il y a aussi les paralysies laryngées qui sont le plus souvent responsable d’une atteinte des nerfs moteurs des cordes vocales (nerfs récurrents), et qui entraîne une fermeture de la glotte : le laser ne peut prétendre à en traiter la cause, mais constitue un moyen simple de pallier la gêne respiratoire, qu'éprouvent ces patients, en réalisant une ablation d'une corde vocale rétablissant ainsi une entrée d'air suffisante.

En cancérologie il convient, comme toujours, de se montrer très prudent ; le laser CO2 est toutefois indiqué à titre curatif pour les tumeurs de la glotte. En cas d'envahissement massif du vestibule laryngé, il permet de réduire le volume tumoral.

L'hypertrophie des cornets du nez, affection peu grave mais gênant la respiration nasale et favorisant le ronflement, est facilement corrigée au laser néodyme-YAG (avec fibre optique). Ce dernier s'avère très efficace, mais surtout très rapide.

Le laser a été utilisé dès 1967 dans ce domaine. Actuellement, c'est le laser à argon, dont le rayonnement est très fortement absorbé par les pigments sanguins, qui est généralement employé : tous les tissus mous de l'oreille moyenne peuvent être ainsi réséqués, vaporisés, sans saignement, ce qui est capital en microchirurgie auriculaire.

En oto‑neuro‑chirurgie, en particulier pour le traitement des tumeurs nerveuses bénignes du nerf acoustique, l'apport du laser à CO2 est majeur : il permet d'aborder la lésion sans saignement important (car il coagule les micro‑vaisseaux), de vaporiser la partie centrale du neurinome, de séparer progressivement et sans dommage la tumeur des tissus avoisinants.

 

f) Broncho‑pneumologie :

La première intervention sur les bronches au laser a été réalisée en 1978, par bronchoscopie, à l'aide d'un néodyme-YAG assorti d'une fibre optique.

Si lors des premiers essais, les lasers à l'argon et au néodyme-YAG ont été mis en concurrence, l'unanimité s'est rapidement faite sur la prééminence du second : l'émission du CO2 ne pouvant être, à ce jour, véhiculée par fibre optique sur une distance suffisante.

Les indications du laser sont pratiquement limitées aux tumeurs et aux sténoses de la trachée et des bronches.

Rappelons que les endoscopes sont des appareils constitués d'un tuyau nanti d'un système optique permettant de pénétrer, d'examiner et d'intervenir à l'intérieur d'une cavité naturelle ou d'un organe. Il existe deux types d'endoscopes (rigide et souple) :

- Les fibroscopes souples, peuvent être aisément introduits dans l'arbre trachéo‑bronchique jusqu'aux bronches de faible diamètre, sans anesthésie générale, l'intervention étant absolument indolore. Cependant il est impossible toutefois, avec ces appareils, de réaliser en même temps la résection laser et l'aspiration des produits de sécrétion , ce qui complique l'intervention.

- Les bronchoscopes, rigides, dont l'introduction délicate nécessite une anesthésie générale parfois bien difficile à réaliser chez des patients en détresse respiratoire, présentent des avantages non négligeables : vision élargie du champ opératoire, possibilité de procéder conjointement à la résection laser et à l'aspiration des sécrétions hémorragiques et bronchiques, ou d'interrompre le geste chirurgical pour oxygéner fortement le malade en cas d'asphyxie pendant l'opération.

Les tumeurs bénignes de la trachée et des bronches, relativement rares, sont peu hémorragiques, de forme généralement sphérique et/ou pédiculée : réséquables en quelques tirs, elles représentent une indication parfaite de la laserthérapie.

Les granulomes inflammatoires se développent sur les cicatrices de trachéo-bronchique. Le laser permet leur destruction sans atteinte du tissu porteur et évite une évolution fibreuse éventuelle susceptible d'entraîner un rétrécissement gênant la respiration.

Les cancers à développement intratrachéal ou intrabronchique entraînent une obstruction des voies respiratoires et une asphyxie du sujet. Le laser ne peut vaporiser la tumeur jusqu'à “ ses racines » et ne représente qu'un moyen palliatif d'efficacité temporaire, permettant toutefois au malade de retrouver un confort respiratoire difficile à procurer par d'autres méthodes.

Les lésions fibreuses survenant à la suite d'intubation ou de trachéotomie entraînent un rétrécissement ou sténose trachéo‑bronchique. Lorsque ces lésions ne représentent qu'un diaphragme fibreux, il est aisé de les volatiliser au laser, sans hémorragie, et de rétablir le calibre bronchique.

Actuellement les indications de l'utilisation du laser au néodyme-YAG en broncho‑pneumologie sont parfaitement codifiées. Les recherches modernes portent sur l'étude de fibres pouvant transporter les rayonnements infrarouges lointains du laser à CO2 : récemment une fibre japonaise a permis de le faire sur des distances n'excédant pas 30 centimètres, ce qui est trop peu, mais constitue un début. Ce rayonnement aurait un intérêt, sans doute limité mais certain, en pneumologie.

 

g) Gastro‑entérologie :

Les lasers ne remplacent pas le bistouri en gastro‑entérologie, mais permettent, grâce à l'endoscopie, de traiter par les voies naturelles, sans “ ouvrir le ventre », certaines hémorragies, perforations et tumeurs du tube digestif.

Ce sont les hémorragies qui ont bénéficié en premier de la laserthérapie en pathologie digestive.

Le traitement se fait généralement en urgence et consiste à effectuer une photocoagulation des vaisseaux saignants par voie endoscopique.

Les lasers utilisés sont l'argon ou le YAG. Le premier, mieux absorbé par les pigments sanguins, nécessite moins d'intensité (en général d'environ 10 watts), mais pénètre 4 à 5 fois moins profondément que le second, qui avec une puissance de 60 à 100 watts assure une hémostase de vaisseaux de plus gros diamètre et plus profondément situés.

Durant l'intervention, l'extrémité de la fibre optique est maintenue à 1 ou 2 centimètres de la surface saignante. Afin d'éviter les brûlures trop profondes, causes de perforation et de péritonite, les tirs doivent être courts : 1,5 seconde en moyenne avec le laser à argon dont le champ doit être constamment nettoyé par un jet d'air coaxial afin de chasser le sang (0,2 millimètres de sang suffisent à absorber totalement le rayonnement), et 0,5 à 1 seconde pour le néodyme-YAG dont la cible doit être rincée à l'eau pour rester visible. Le traitement doit être continué jusqu'à l'arrêt complet de l'hémorragie.

Le laser à néodyme-YAG, plus efficace mais plus dangereux que le laser à argon, doit donc être réservé aux hémorragies sévères.

Les hémorroïdes sont généralement gênantes ou douloureuses et se manifestent souvent par des saignements que l'on peut voir sur les selles. Elles se soignent médicalement si elles ne sont pas trop développées, ou s'opèrent classiquement, mais aussi par le froid (elles se “ dessèchent » après cryocoagulation), ou au laser CO2 qui les coagule et les détruit d'une façon très précise : les suites opératoires sont nettement moins douloureuses.

Il s'agit le plus souvent de tumeurs épithéliales, développées à partir de la couche cellulaire interne du conduit digestif, dont le type est variable selon les organes.

La photodestruction laser s'inscrit parmi les méthodes de traitement local d'une tumeur : elle comporte des avantages (simplicité de l'opération, faible durée de l'immobilisation du patient) et des limites (impossibilité de détruire complètement une tumeur qui envahit toute l'épaisseur de la paroi ou la dépasse). Son indication ne peut être portée qu'après avoir fait une certaine estimation.

Les tumeurs bénignes  peuvent être détruites avec une grande sécurité, sous coloscopie, au laser à néodyme-YAG à travers une fibre gainée et ventilée. Cette intervention, qui ne comporte pas d'hospitalisation, semble constituer une bonne prévention des cancers du côlon et comporte moins de récidives que l’électrocoagulation classique.

Il y a aussi le traitement des tumeurs malignes qui peut être à visée curative ou palliative. Le laser utilisé est toujours le néodyme-YAG à forte puissance, pour ses qualités de pénétration et de coagulation entraînant la destruction des tissus.

 

h) Urologie :

En urologie, le laser s'est développé tant pour la chirurgie à ciel ouvert que pour l'endoscopie. En chirurgie classique, les lasers à argon, à CO2 et à Nd : YAG apportent leurs qualités respectives, mais ne sont qu'un supplément.

L'utilisation des lasers en endoscopie nécessite, vu la présence d'urine, une adaptation du matériel. Il est ainsi possible de traiter certaines lésions de l'urètre et de la vessie. L'intervention, indolore, ne nécessite ni anesthésie ni hospitalisation et elle n'est pratiquement pas hémorragique. Les suites opératoires sont excellentes et les récidives moins fréquentes que par les méthodes classiques.

La crise de colique néphrétique est horriblement douloureuse : elle se traite par  des sédatifs. . Pour éviter les récidives, lorsqu'on a localisé le calcul (concrétion pierreuse), il faut l’éliminer.

On peut, de nos jours, utiliser la lithotriptie laser par voie endoscopique. Le principe est de créer une onde de choc à l'intérieur même de la concrétion. Pour ce faire, il est nécessaire d'amener l'énergie au contact du calcul, repéré par endoscopie des voies urinaires : une fibre optique fine (de 200 ou 400 microns de diamètre) transmet les impulsions du laser, très brèves, et concentre une puissance instantanée considérable dans la cible où l'énergie photonique se transforme en vibrations acoustiques sous l'impulsion du choc, fragmentant ainsi le calcul en morceaux suffisamment menus pour être éliminés naturellement par les voies urinaires.

 

i) Gynécologie :

En gynécologie, le laser permet avant tout de traiter les affections qui touchent la fonction de reproduction et la pathologie tumorale, bénigne, précancéreuse ou maligne, affections par les voies naturelles (vulve, vagin, col et isthme utérins) ou trans‑abdominales (utérus, trompes, bas‑ventre).

Le laser utilisé est principalement le CO2, soit directement, c'est‑à‑dire à l'aide d'un bras articulé et d'une pièce à main au cours d'interventions classiques à ciel ouvert, soit couplé à un endoscope trans‑abdominal (cœlioscope) ou à un appareil de microchirurgie.

 Dans les tumeurs de la vulve : la vulvectomie peut se faire au laser à CO2, à la pièce à main, avec l'avantage sur le bistouri d'une meilleure cicatrisation et de suites opératoires moins pénibles.

Les dysplasies du col de l'utérus sont caractérisées par la présence d'un revêtement cellulaire anormal. L’évolution vers la cancérisation est possible et dans ce cas la vaporisation laser est utilisée. Cette méthode est facile, ne nécessitant qu'une puissance de 15 à 25 watts, rapide et sans anesthésie.

Par sa précision de destruction en surface et en profondeur, le caractère aseptique de l'intervention, la cicatrisation plus rapide et de meilleure qualité, l'absence de conplication, le laser à CO2 parait nettement supérieur aux autres techniques de traitement local (électrocoagulation, cryothérapie).

Souvent découvertes à un stade tardif, les tumeurs de l'ovaire ne peuvent pas toujours être extirpées en totalité. Après l'opération, il persiste fréquemment dans le petit bassin des reliquats tumoraux sur les organes voisins comme l'intestin grêle, le côlon, la vessie, dont la destruction par les moyens classiques était difficile : le laser permet de les vaporiser sans faire courir les risques de nécrose que le bistouri électrique entraînait, ce qui améliore le pronostic.

§         Pathologie des trompes de fallope :

Les interventions au laser sur les trompes et les organes situés au niveau du bassin peuvent être réalisées au cours d'opérations gynécologiques classiques et donne des résultats remarquables.

Le traitement des stérilités d'origine tubaire a été transformé par la combinaison du microscope opératoire et du laser à CO2, dont la finesse d'impact a rendu possible la réfection endoscopique très précise et la reperméabilisation de trompes utérines et de pavillons obstrués, ainsi que la reconstitution des trompes sectionnées ( la plupart des femmes ainsi traitées ont pu devenir enceintes et mener à bien leur grossesse).

 

j) Cardio‑angéiologie :

La pathologie cardio‑vasculaire peut se diviser en deux parties:

‑ maladies du muscle cardiaque.

‑ maladies des vaisseaux.

Il est certain que les lasers ne peuvent rien pour le muscle cardiaque, par contre en pathologie artérielle, leur utilisation est effective, bien que récente. Elles sont surtout utilisées pour désobstuer les artères.

Les premiers essais de photodésobstruction datent de 1980, et les progrès techniques de ces dernières années ont apporté une amélioration des conditions opératoires : lasers pulsés qui délivrent une énergie intense en un temps très court et vaporisent l'obstacle sans diffusion de chaleur (lasers excimères en particulier ne lésant pas la paroi artérielle), et surtout, peut‑être, cathéters multifibres. Ces derniers offrent, grâce à leurs très nombreuses fibres optiques ultrasouples une grande sécurité de guidage, un accès relativement facile des artères, y compris celles qui irriguent le cœur (coronaires), et permettent de traverser plus aisément les rétrécissements sans risque d'entraver la circulation dans l'organe. Actuellement, ce ne sont plus seulement les grosses artères des jambes qui sont traités. Cependant, cette méthode reste expérimentale et en phase d'évaluation.

 

k) Rhumatologie :

L'exploration endoscopique des articulations (arthroscopie) s'est beaucoup développée depuis une décennie. Le matériel s'est perfectionné tout en s'affinant en ce qui concerne le diamètre. Elle n'est plus seulement un procédé d'investigations exceptionnelles, mais un moyen de pratiquer des interventions à moindres dégâts.

Le laser a pu pénétrer la spécialité et nul doute que les lasers, à excimères en particulier, devraient être très performants dans cette spécialité pour découper les ligaments sans les léser, volatiliser des concrétions cartilagineuses ou fibrosseuses...

 

m) Odonto‑stomatologie :

Dès 1963 des études ont été faites, aux USA puis en Allemagne, sur la possibilité d'application du laser à l'art dentaire. Mais ces travaux n'ont pas eu de suite immédiate car, si l'élévation thermique obtenue au niveau de la carie aboutit à une véritable volatilisation du tissu malade, à une stérilisation de la cavité et à une restructuration superficielle des parois laissant la dent prête à être obturée, ces avantages étaient entachés d'un inconvénient majeur : la dent était mortifiée par le traitement photonique! L'analyse a montré que ce sont les phénomènes mécaniques provoqués par les impulsions répétées des émissions des lasers à rubis qui entraînent, par effet de choc, la destruction du paquet vasculo‑nerveux de la pulpe dentaire, et la perte de vitalité de la dent.

Les lasers continus n'ont pas ces inconvénients, et c'est le développement des lasers à CO2, à néodyme-YAG et à argon qui a permis un renouveau thérapeutique dans cette discipline.

Au niveau de la couronne (recouverte d'émail), la carie correspond à une destruction localisée de la dent. Elle débute par une atteinte de l'émail, fissuration ou décalcification, libérant ainsi les constituants minéraux et favorisant la production de micro‑organismes et de leurs toxines qui s'accompagnent généralement de douleurs, pour aboutir à la perte de la vitalité dentaire.

Les industriels ont réalisé pour les dentistes des lasers à CO2 miniaturisés, émettant en continu, qui peuveut tenir en main comme un gros crayon, et dont l'extrémité peut être dirigé vers les faces postérieures des dents. Ils se manipulent comme une fraise dentaire, à la différence que le praticien n'a plus le contact tactile avec la dent. A une puissance de 4 watts, ce type de laser provoque, par de rapides balayages de la zone atteinte, une véritable excision de la carie, par couches de 150 microns (l'abrasage est beaucoup plus précis qu'avec la fraise qui enlève un millimètre à chaque passage). De plus la température de la pulpe ne s'élève pas de plus de 2 degrés pour des impacts de 4 watts ne dépassant pas 0,5 seconde, ce qui permet de conserver vivantes des dents profondément cariées, alors qu'avec la technique classique de fraisage il serait absolument nécessaire de procéder à leur dévitalisation. Ces caractéristiques ont un intérêt thérapeutique majeur dans la réalisation des coiffages (procédés destinés à isoler la pulpe afin de maintenir la vitalité dentaire).

Lorsque la dent cariée a été traitée trop tardivement, la pulpe s'infecte, l'infection fuse jusqu'à la pointe de la racine et peut déclencher un abcès : il est alors nécessaire de désinfecter l'intérieur de la dent. Pour ce faire, il faut «dévitaliser» la dent en procédant à l'extraction de la pulpe, à un nettoyage, à l’élimination de la partie de la  racine infectée et au remplissage de la totalité de la cavité résiduelle avec une pâte désinfectante.

Le laser à CO2 permet, après obturation du canal radiculaire par la pâte, de stériliser le bout de la racine par irradiation de toutes ses faces et de son extrémité grâce à un miroir réfléchissant à 90°. Cette méthode permet d'éviter la résection de la partie infectée de la racine ce qui est un gros avantage (si la racine est coupée trop court, la dent ne tient plus!). Elle n'entraîne aucun passage de microbes dans le sang ( la pointe de la racine est là où pénètrent les éléments vasculaires et nerveux)  et donne une certitude de stérilisation du foyer apical.

§         Laser et chirurgie maxillo-faciale :

La chirurgie des os maxillaires, où sont enchâssées les dents, est faite avec le laser à CO2, mais d'une puissance de 60 watts comme en ORL. Il sectionne comme un bistouri, volatilise, stérilise instantanément les tissus, évite leur saignement, ne provoque qu'un trauma minime, n'entraîne pas de sensation désagréable ni de contraction musculaire. Il réduit le temps de cicatrisation et d'hospitalisation et ne nécessite en règle générale, pas de traitement post‑opératoire.

§         Prospectives :

D'autres types de laser ont été expérimentés :

- le Néodyme-YAG présente un intérêt dû à son action sélective sur les tissus colorés : il permettrait l'élimination des caries situées dans les sillons des dents, ce qui serait très utile, en particulier chez les enfants.

- l'argon n'a aucun effet probant sur l'émail, mais, éliminant le cément (jointure des dents) infecté au niveau des dents déchaussées.

 

 

III Conclusion :

 

Les lasers sont donc maintenant indispensables dans le milieu médical car ils permettent de soigner des maladies qui seraient difficiles à guérir sans ces machines à photons. De plus, leur capacité à véhiculer sur de longues distances des énergies extrêmement concentrées leur présage un avenir plus que certains. Les lasers puis­sants, chirurgicaux en particulier, sont donc dangereux : ils peuvent brûler les opérés hors de la zone de visée, ainsi que les opérateurs, et détériorer les objets qu'ils sont susceptibles de croiser sur leur trajet. Il est donc indispensable d'assurer la protection:

- Du personnel travaillant dans la salle d'opération par le port de lunettes filtrant spécifiquement la longueur d'onde du ou des lasers utilisés.

- Du patient, par des draps et un pansement oculaire humidifié.

- Des instruments inflammables par un revêtement métallique.

Il faut, de plus, par une bonne collaboration entre chirurgien et anesthésiste, veiller à ne pas utiliser, dans le champ opératoire, des matériaux susceptibles d'être enflammés par l'émission laser ou de provoquer une explosion (tel qu'un mélange trop riche en oxygène en chirurgie bronchique).

La fumée provoquée par la volatilisation des tissus peut opacifier le champ opératoire, surtout en endoscopie, et même asphyxier le malade en chirurgie laryngée ou bronchique. Elle doit être évacuée : divers systèmes de ventilation ont dû être adaptés à chaque cas, mais la simple ventilation de la fibre optique peut parfois suffire.

L’utilisation du laser oblige donc à prendre quelques dispositions et donc des contraintes mais ces points négatifs ne sont que des formalités car leur efficacité est telle que l’on ne peut envisager d’abandonner leur emploi dans le milieu hospitalier.